Elle est belle cette équipe de Suisse, elle a de la gueule, comme l’on dit, et trois-quatre gabarits au-dessus de 1m90, ce qui impressionne encore plus ! Et surtout, elle est très sympathique et délivre une belle image de joie de vivre et du sport cycliste, comme on aimerait en voir plus souvent. C’est la vitrine de demain, celle qu’il faut absolument soutenir et mettre en évidence pour redorer le blason d’un sport qui ne mérite pas d’être éclaboussé par une nouvelle affaire née de l’irresponsabilité de son organisme faîtier, l’UCI !

Colin Stussi/GL, Stefan Küng/TG, Frank Pasche/VD, Lars Schnyder/VD, Simon Brühlmann/ZH, Théry Schir/VD, Gabriel Chavanne/BE, Dylan Page/VD, Fabian Lienhard/ZH, Simon Pellaud/VS, Lukas Spengler/SH, Roland Thalmann/LU, Matthias Rüttimann/ZH, Tom Bohli/SG (de gauche à droite). Photo Bertrand Duboux

Colin Stussi/GL, Stefan Küng/TG, Frank Pasche/VD, Lars Schnyder/VD, Simon Brühlmann/ZH, Théry Schir/VD, Gabriel Chavanne/BE, Dylan Page/VD, Fabian Lienhard/ZH, Simon Pellaud/VS, Lukas Spengler/SH, Roland Thalmann/LU, Matthias Rüttimann/ZH, Tom Bohli/SG (de gauche à droite). Photo Bertrand Duboux

En stage à Macolin du 13 au 21 juin sous la direction du coach Heiko Salzwedel, les membres du cadre national M23 de Swiss Cycling se préparent activement pour les championnats d’Europe organisés pour la première fois en Suisse (9-13 juillet). Un événement important qui motive chacun d’entre eux car il s’agit bien là d’une opportunité à saisir.

Théry Schir et Stefan Küng. Photo Bertand Duboux

Théry Schir et Stefan Küng. Photo Bertand Duboux

A la veille de leur retrouvailles dans ce havre de paix, au-dessus de Bienne, certains d’entre eux ont disputé avec les Elite le GP de Gippingen remporté au sprint par l’Allemand Simon Geschke devant l’Argovien de BMC Silvan Dillier. Une dure journée toutefois pour cette nouvelle génération qui a souffert du rythme élevé imposé par les professionnels dans le final. Mais l’apprentissage du métier et de la compétition passe par cette confrontation à l’étage supérieur et l’on espère qu’on en vérifiera les bienfaits sur le circuit nyonnais face aux meilleurs Belges, Italiens, Français, Allemands, Britanniques et Hollandais, entre autres.

Une osmose parfaite

Lundi 16 juin, accompagnés du mécanicien Matthias Peter et du physiologiste Raphael Faiss, ils sont venus de Macolin à Nyon à quatorze pour reconnaître le parcours qui passe par Eysins, Arnex, Céligny et Crans. Un parcours exposé ce jour-là à un régime de forte bise, ce qui les a fait prendre conscience de ses particularités et de ses difficultés.. Manquaient à l’appel le grimpeur valaisan Valentin Baillifard, le Genevois Jacques Friedli et le Fribourgeois Maxime Froidevaux, ce dernier engagé sur le Tour de Serbie. Tous se sont déclarés très positifs vis-à-vis du tracé, ce qui est une belle satisfaction pour les organisateurs.
Au total, trois tours pour repérer les lieux, prendre ses marques, avant de se retrouver au vestiaire. Puis douche et repas à l’hôtel Real avant de repartir en voitures pour Macolin. Une parenthèse en toute décontraction, dans une ambiance très agréable, comme une journée de récupération dans le programme établi au lendemain, pour certains (dont le Lausannois Théry Schir), d’un dur Tour du Beaujolais en trois étapes gagné par le Zurichois Simon Zahner (30 ans). Une petite sortie en commun qui confirme que vivre ensemble pendant plusieurs jours permet de travailler et de forger un véritable esprit de groupe et, sur ce plan-là, l’objectif semble atteint : l’osmose est parfaite entre les divers éléments qui respirent la santé. Il est à souhaiter qu’il en soit de même dimanche 13 juillet. Que la solidarité entre eux permette aux Suisses de jouer les premiers rôles et de concrétiser devant leur public les belles promesses qu’ils ont fait naître depuis deux saisons sur le plan international.

Heiko Salzwedel, coach national avec Gabriel Chavanne. Photo Bertrand Duboux

Heiko Salzwedel, coach national avec Gabriel Chavanne. Photo Bertrand Duboux

On pense particulièrement au puissant Thurgovien Stefan Küng (21 ans/1m93/84 kg) qui ne cache pas ses ambitions de podium, voire de victoire contre la montre. Mais l’équipe de Suisse c’est aussi et surtout les Vaudois Théry Schir, Lars Schnyder, Frank Pasche, Dylan Page, le Valaisan Simon Pellaud, le St.Gallois Tom Bohli, le Schaffhousois Lukas Spengler, les Zurichois Fabian Lienhard Matthias Ruetimann, Simon Brühlmann, le Bernois Gabriel Chavanne, le Glaronnais Colin Stüssi et le Lucernois Roland Thalmann.

Les membres du cadre national M23 en reconnaissance à Nyon, au départ du Centre sportif de Colovray. Photo Bertrand Duboux

Les membres du cadre national M23 en reconnaissance à Nyon, au départ du Centre sportif de Colovray. Photo Bertrand Duboux

La sélection définitive des M23 (les places sont particulièrement chères cette année) sera faite à l’issue du championnat de Suisse Elite qui aura lieu dimanche 29 juin à Pfaffnau-Roggliswil. Chaque équipe nationale peut aligner au maximum trois coureurs contre la montre (toutes les catégories), 7 coureurs (M23 et juniors) et 8 concurrentes (M23 et filles) dans la course en ligne.

Ils ont dit

Tom Bohli

– C’est un très beau parcours, pas trop dur sur le papier. Mais avec un peloton de M23 qui sera très motivé, il deviendra vraiment dur au fil des tours. J’aime à la fois le chono et la route. Les deux disciplnes me plaisent mais on verra la sélection… Dans notre équipe, il y a certainement quelques coureurs qui ont la possibilité d’obtenir un bon résultat, peut-être une médaille ou même gagner. Qui sait !

Stefan Küng

– Les deux parcours me plaisent bien. Je mise surtout sur le contre la montre où je vise le podium, peut-être le titre. Le tracé est technique , roulant, tout ce qui me convient bien, avec un final très roulant. Donc c’est là où j’espère faire la différence !
– La route, en revanche, c’est toujours un peu une loterie ?
– Oui, je ne crois pas que c’est le coureur le plus fort qui va s’imposer. Le circuit est très nerveux, il y aura certainement des attaques, avec des groupes. C’est très important de courir en équipe. Qu’importe qui est sur le podium ou qui gagne. Si on court comme cela, on peut faire quelque chose de bien. Mais si chacun roule pour soi, ça n’ira pas.
– L’équipe de Suisse a-t-elle un collectif pour gagner ?
– Oui, cette année ça va très bien. On se connaît depuis longtemps. C’est la même génération. C’est aussi pour cela que l’on fait ce stage à Macolin, pour forger cet esprit de groupe. Car les championnats d’Europe sont en Suisse, dans notre pays et l’on doit avoir une fierté déjà sur la ligne de départ. On doit courir en équipe car on a la croix suisse sur le maillot. Si chacun est conscient de ça, je crois vraiment que l’équipe de Suisse peut jouer un grand rôle !

Frank Pasche

– Le parcours est intéressant. Il est usant. Il n’y a pas de cols, pas de grosses bosses mais ça va faire très mal au fil des tours et les tout costauds seront devant
– Les Suisses aussi ?
– Oui, je crois que le contingent cette année est très bon chez les Espoirs. Il y a une importante confrontation à l’interne. Et donc la meilleure équipe et les meilleurs coureurs seront au départ à Nyon.
– Belges et Hollandais devraient être à l’aise sur un tel parcours ?
– Oui, c’est assez sinueux par moments. Il y a des petites routes, du vent dans un sens ou dans l’autre. On tourne à gauche, à droite. On peut comparer ça avec la Belgique.
– Et vous ?
– Une bonne partie de mes objectifs restent sur la piste. Donc la route cette année ça ne marche pas forcément comme je le voudrais. J’espère monter en puissance petit à petit et m’améliorer au fil de la saison.

Simon Pellaud

– C’est un beau parcours pour un championnat d’Europe, technique, et il va falloir rester placé durant toute la course pour finir à l’avant. Ce n’est pas forcément le plus costaud qui va gagner mais certainement le plus malin… Un Belge sur ce type parcours va bien se débrouiller. Il me convient. J’aime bien cet aspect tactique qui prédomine.
– Que penser de l’équipe de Suisse ?
– Cette année, c’est vraiment impressionnant, ça a franchi un palier. Je suis dans l’équipe nationale depuis plusieurs années, mais je n’ai encore jamaus vu ça ! Avec Küng, Bohili, Schir, on est vraiment soudés et capables de s’entraider pour la gagne. Peu importe qui lève les bras en fin de compte. Avec un peu de réussite, tout peut arriver, on peut gagner.
– Le chrono, la route ?
– Avec Stefan Küng, on a l’un des favoris du chrono. Il en a fait son principal objectif de saison et, à mon avis, il sera très fort ce jour-là.
– Et vous ?
– Je vais me concentrer sur la course en ligne. J’espère anticiper sur la grande bagarre et être devant dans le final. Ce serait une belle récompense.

Théry Schir

– Pour mes trois premières années en M23, ça se passe plutôt bien. J’ai la chance d’être dans une bonne équipe, EKZ Racing Team, qui me fait faire des superbes courses pour apprendre et qui met tout à ma disposition. Pour la suite, j’espère toujours progresser pour monter encore d’une catégorie, puis courir chez les professionnels plus tard. Mais comme je vois que ma génération progresse avec les Stefan Küng, Fabian Lienhard, ça motive. On voit qu’on n’est pas loin du meilleur niveau international et l’on n’a pas à rougir face aux autres.
– Entre la piste ou la route, faudra-t-il faire un choix ?
– Je ne crois pas. Il faut juste bien planifier la saison avec les différentes compétitions sur piste et sur route. Et bien discuter avec les entraîneurs respctifs. C’est surtout de la coordination. Je crois que ces deux disiplines sont assez complémentaires. On voiit maintenant sur les grandes courses professionnelles gagner les anciens pistards, comme l’ex-champion du monde australien Cameron Meyer au Tour de Suisse. La piste apporte beaucoup à la route, et vice-versa.
– Quelle est votre spécialité ?
– Je pense être sélectionné pour le contre la montre et la route. Mais contrairement à Stefan, je ne vais pas viser un top 10 ou un top 5 sur le chrono, même si on court à la maison. Le contre la montre, ça exige une grosse performance et je ne suis pas encore assez fort physiquement pour jouer les premiers rôles dans cette discipline.
– Quel est le Suisse qui sort le plus du lot ?
– Stefan Küng, clairement. C’est lui qui a les meilleurs résultats internationaux. Je pense que l’année prochaine, il va être professionnel. C’est clairement le leader de l’équipe, si l’on peut dire ça. Sans être péjoratif, c’est aussi la forte tête, la « grande gueule » du groupe, la personnalité marquante.. Il a un charisme qui fait que c’est un peu un meneur. Depuis qu’on est juniors, on a toujours été associés en équipe de Suisse, on a fait des résultats ensemble. Il est très intelligent. Il sait quel est le meilleur des autres pour faire de bons résultats. Si on a des chances de médailles, c’est d’abord dans le contre la montre grâce à Stefan.. En ligne, si ce n’est pas lui qui gagne, il sera capable de mettre un autre Suisse sur orbite. Mais il n’y a pas que lui qui est fort : il y a aussi Pellaud, Bohli, Spengler. On a vraiment une équipe avec un niveau général haut.
– Et vous ?
– Les championnats d’Europe ne sont pas souvent chez nous, en Suisse. Ca tombe au bon moment par rapport à notre progression et à notre âge. On arrive à un certain niveau. Quand je vois l’organisation, tout ça pas loin de la maison, ça motive encore plus, ça donne plus de pression et d’envie de bien faire. Je crois que c’est une bonne occasion pour faire une bonne course.

Raphael Faiss, physiologiste de l’endurance

– On a organisé ce stage de préparation à Macolin spécifiquement pour les championnats d’Europe. Mais c’est surtoutl’occasion de créer un esprit d’équipe entre ces jeunes qui se côtoyent sur le calendrier habituel et autour du nouvel entraîneur national Heiko Salzwedel. Ca crée une bonne dynamique de groupe nécessaire pour espérer faire quelque chose sur une course d’un jour avec une équipe nationale.
– Cette génération est-elle exceptionnelle pour la Suisse ?
– On a actuellement des jeunes qui ont cette passion pour le cyclisme, qui ont compris que sans travail on n’obtient rien. Donc on a un grand intérêt pour la physiologie et l’entraînement lui-même. Commnt il faut savoir bien s’entraîner pour se préparer et arriver au plus haut niveau avec du travail efficace.
– Comment vivent-ils le passé du cyclisme ?
– J’ai le sentiment qu’il y a une grande frustration auprès des coureurs qui doivent vivre avec ce passé du cyclisme, alors qu’eux ont vraiment envie de montrer que le cyclisme est un sport beau, car il faut tellement travailler pour arriver au plus haut niveau. Mais ils veulent le faire dans de meilleures conditions, avec leurs moyens, avec leur santé et on sent qu’ils sont tout à fait conscients des sacrifices nécessaires.
– Y a-t-il un changement de mentalité ?
– On sent surtout qu’en tant qu’entraîneur-physiologiste, on a les moyens d’influencer les athlètes, de les intéresser et surtout de les éduquer pour qu’ils fassent le travail de façon correcte, qu’ils sentent eux mêmes les progrès de cette approche un peu plus scientifique.
– L’affaire Froome ne va-t-elle pas tout faire s’écrouler ?
– Non, je ne pense pas car justement, si on base le travail sur la relation avec l’entraîneur, ils peuvent y arriver sans se préoccuper de ces affaires qui relèvent plus du business que du cyclisme, qui se passent dans des spères haut placées qui ne les concernent pas forcément.