Si j’étais Thierry Gouvenou, directeur de course, je ne serais pas très fier après l’incident du passage-à-niveau de Wallers qui a failli provoquer un drame sur le parcours de Paris-Roubaix. Et cela sous les yeux de millions de téléspectateurs. Malgré le feu rouge clignotant et les barrières qui s’abaissaient, une bonne cinquantaine de coureurs ont franchi les voies. On en a vu encore cinq-six qui zigzagaient entre les barrières pour traverser huit à dix secondes avant le passage d’un TGV ! Les autres ont pu être stoppés à temps mais la catastrophe a été évitée de justesse. Incroyable.

Un trentaine de coureurs ont franchi le passage à niveau alors que les barrières étaient fermées, et une bonne vingtaine alors qu’elles étaient en train de descendre.

Un trentaine de coureurs ont franchi le passage à niveau alors que les barrières étaient fermées, et une bonne vingtaine alors qu’elles étaient en train de descendre.

Défaillance et négligence

Les fautifs n’ont pas pu être tous identifiés et c’est ce qui justifie qu’aucune sanction ne soit tombée sur le peloton en violation flagrante du règlement UCI. Il nous semble pour le moins évident que la responsabilité de la direction de course et des commissaires UCI est engagée. Pourquoi n’ont-ils pas anticipé en envoyant quelqu’un sur place ou en désignant l’un d’entre eux afin de mettre en place un barrage. Au cas où…

On nous dit que dans cette zone, le tracé de la course coupe les voies à cinq reprises au moins dans un périmètre d’une quinzaine de kilomètres. Si c’est vraiment le cas, il n’y a qu’à prévoir et à s’organiser avant. Des mesures prévisionnelles doivent être envisagées. Cela n’a pas été fait et c’est une défaillance des services d’ASO, mais aussi une négligence des commissaires UCI dont la réputation en prend de nouveau un méchant coup.

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C’est bien cela qui nourrit la polémique. Certes, les coureurs connaissent parfaitement le règlement et doivent s’arrêter devant un passage-à-niveau dont les barrières se ferment sous peine de disqualification. C’était arrivé en 2006 à Leif Hoste, Peter van Petegem et Vladimir Gusev qui avaient franchi un passage fermé à 10 km de Roubaix, derrière Cancellara qui filait vers la victoire. Ils avaient fini dans cet ordre mais avaient été éliminés du classement. Boonen, Ballan et Flecha, qui composaient un troisième groupe de poursuite et qui, eux, s’étaient arrêtés 30 secondes pour laisser passer un train de marchandise, mais qui était repartis avant que les barrières ne soient relevées, n’avaient pas été sanctionnés. Cette année-là, ASO avait écopé de 5’000.- francs suisses d’amende pour « défaut d’organisation ».

Règlement à la tête du client?

Et cette fois aucun déclassement, aucune sanction alors que l’incident était bien plus grave. C’est à croire que le règlement UCI est appliqué à la tête du client. Le président du jury, le Belge Guy Dobbelaere, a justifié cette décision en arguant que cela aurait été injuste pour tous les coureurs fautifs mais non identifiés et qui seraient ainsi passés entre les gouttes. Mais que dire de ceux qui ont vu le motard de gendarmerie leur signifier de s’arrêter et qui n’ont pas obtempéré, dont Arnaud Démare, le champion de France, pourtant facilement reconnaissable, lui !

Depuis de nombreuses années, ASO possède une vraie maîtrise dans l’art de l’organisation. Mais sur ce coup-là, elle s’est fourvoyée et les commissaires UCI avec elle. Les explications et les justifications des uns et des autres sont pitoyables. Quels seraient leurs commentaires si plusieurs coureurs avaient été déchiquetés par le train à grande vitesse de la SNCF ?
Bertrand Duboux 13.4.2015